La part difficile du mot "aimer"
Parce que désormais les mots me font peur, qu'écrire devient une angoisse oppressante. Puisque ta vie s'est engouffrée dans mes brèches les plus fragiles, comment te dire aujourd'hui que je t'aime? Comment aimer? Quand nos rêves les plus doux deviennent réalité, que reste-il sinon cette irrépressible envie d'y retourner? Tes regards me percent, m'intimident, mes mots se perdent, s'évaporent. Mais où vont-ils? Déstructuré, morcellé, ce paragraphe est à l'image de la vie que je mène, cette vie que tu peines à comprendre parfois, ce pessimisme collant, cette nostalgie du temps passé. Tout ce que tu ne sais pas de moi se cache dans ces mots qui désormais m'effraient, me font fuir. Comment te dire que je t'aime, comment le savoir même? Comment t'offrir ce bout de moi qui m'échappe? Il y a tellement de choses que je voudrais te dire, tellement de choses que des mots alambiqués ne traduiraient pas, parce que notre amour est simple, parce qu'il vibre loin des fantasmes de mon enfance, pace qu'il me fait vivre par delà ces rêves enfumés. Cette part de toi que tu m'offres chaque jour, comme un appel, ces doutes et cette peine que tu poses sur mes épaules sont pour moi enivrants, je pourrais les porter à bout de bras, mener aveuglement ce combat qui les exorciseraient, à mots couverts. Je pourrais... En suis-je capable? Comment te dire aujourd'hui que je t'aime? Comment aimer? Pour protéger l'être fragile que tu caches sous ta légèreté, cette violence qui dort en moi pourrait surgir, c'est peut-être ainsi que je t'aime. Je ne dois pas à en dire trop, je ne dois pas voler l'insouciance de ce "nous" en construction, décadenasser l'amour qui nous lie, je dois simplement respirer, dans ton cou m'épancher, dans la nuit t'observer. Pour sentir ton souffle danser, poser ma main sur ton torse, tes yeux clos, ton esprit voyageant. Aux longs discours je préfèrerai ces gestes simples, pour toujours embrasser en moi l'idée du toi qui me tient, ici, parmi les questions, par delà la peine. Du "Pourquoi" je suis passé au "Comment", c'est à toi que je le dois.