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Etirez-moi la prunelle des yeux pour que je vois aussi loin que je veux...
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2 octobre 2006

Jouir de ta solitude

tn_le_passage_005

Trempé comme après une averse. Sauf qu'il n'y a pas d'eau, pas à torrents en tout cas. Juste quelques gouttes qui tombent sans fracas sur l'asphalte, et décorant les toits de perles fluides, des nuages forment un seul et même ciel sombre et gris. Il n'est pas accessible à tous d'être une de ces gouttes, au moins quelque chose de léger. L'une d'elles tombée en syncope se réveille sur la fleur, la veine que de jouir ici d'une place présidentielle. Et comme si l'arbre était jalou, on peut l'entendre tonner, dérobant la figure de l'orage. À ceci près que le grand maronnier, victime des années, ne peut se faire plus puissant que le ciel. Il me semble voir au loin la silhouette, est-ce un homme ou une femme, un petit garçon même, l'identité trouble d'un inconnu tombé là par hasard, comme la goutte échoue sur la fleur. Immobilité parfaite d'une empreinte, tandis que mon âme, aux mouvements tortueux se trouble un peu plus. Il n'est guère d'amour sans souci, ni de rencontre sans sourire. [J'en suis venu à penser que ces voitures que je vois toujours au loin, carcasses emplies de douleur, sont comme les transports de mon coeur. Toujours rapides et sans détours, accidentées ou arrivant à destination. Mon regard ne les croise qu'une seule fois, à moins que certaines m'aient invitées deux ou trois fois au spectacle]. La silhouette n'avance jamais, c'est à la fois jouissif et mortel, la désirer et la vouloir. Il est ici une nuance qui ne s'explique pas, quelque chose de l'ordre de l'abstraction complète. Cette personne, au fond, n'est peut-être que le reflet d'un idéal, l'incarnation de ma souffrance ou l'être qui, à un point rendu, ne fait que m'attendre, le jour où les astres ou toute autre divinité, auront décidé de me rendre l'équilibre qu'en réalité je n'ai jamais eu. Dans le flou du voile humide, on pourrait croire au piège, à l'illusion d'une relation souffrante mais aimante. [Notre solitude à jamais nous rappelle qu'il est bon de vivre. Pourquoi? Peut-être parce que vivre solitaire, c'est vivre librement et souhaiter la présence de l'autre, enfermé malgré tout dans l'angoisse de vivre pour toujours cette infinie tristesse que nous inspire une chambre silencieuse]. La silhouette, j'ai cru plus d'une fois en effleurer l'échine, caresser la lèvre et jouir de son nectar. Et plus d'une fois, l'oeil avide, je m'en suis retourné vers d'autres horizons pôlaires, ceux de l'union de mes propres mains. Il n'est d'autre paradis que la terre, car savons-nous vraiment de quoi est fait cet Eden tant espéré? La douleur, aussi monstrueuse soit-elle se montre  dans son aspect le plus sincère, tandis que la joie nous trompe et que l'opposé de l'enfer nous fait fantasmer. Il n'est d'autre feu que tes mains, qui déposant sur moi leur acide addictif, ont fait de mes tourments des statues de bronze immortelles. Toi, silhouette de passage, je t'attends encore et encore jusqu'au jour où ces icones s'éveilleront. Toi, tu tomberas de haut quand tu apprendras que je reviens du bas, te tordre le cou mon amour. Que j'aimerais, déposer mes mains, une dernière fois sur ce corps d'Adonis, avec lequel tu m'abusas, jouissant de ta solitude, ainsi que tous ces pauvres êtres que nous sommes.

tn_le_passage_008

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